Najib Arbach, responsable pédagogique de Frello, présente dans cet article comment utiliser les modules de Frello en renforcement des cours avec la mise en place d’un lien entre présentiel et autonomie.
Le renforcement signifie ancrer les connaissances et les savoir-faire dans la mémoire à long terme. Quand un apprenant découvre une nouvelle information ou pratique un nouveau savoir-faire communicatif, c’est d’abord sa mémoire de travail qui est sollicitée. Or, la mémoire de travail est temporaire et limitée, c’est-à-dire que les informations qui y sont stockées sont relativement réduites et notre cerveau ne les conserve pas. C’est ce qui se passe, par exemple, lorsque les apprenants sont dans une situation d’attention passive. Une problématique survient aussi par la suite : en cas de réécoute ou de relecture passives, il se produit un phénomène de rémanence. Le cerveau de l’apprenant stocke une nouvelle fois la même information, et comme ce n’est pas la première fois, il a l’illusion que l’information est acquise.
Bien entendu, nous ne sommes pas des poissons rouges (même si c’est un mythe, ils ont bien de la mémoire), et notre cerveau peut s’affranchir des limites de notre mémoire de travail. Pour qu’un apprentissage ait lieu, les informations et les savoir-faire doivent être stockés dans notre mémoire à long terme (scientifiquement, notre cerveau crée de nouvelles connexions synaptiques pour cela). Plusieurs moyens sont possibles pour ce faire, dont l’effort de récupération. Au lieu de rester passif, l’apprenant doit fournir cet effort en manipulant l’information et en essayant de se rappeler ce que sa mémoire de travail a temporairement conservé. Il s’agit donc d’un travail de restitution qui permet de consolider l’apprentissage sur le long terme.
Pour un apprentissage efficace de la langue, il faut répéter plusieurs fois l’effort de récupération. Si d’anciennes méthodes de FLE avaient bien compris ce principe, leur défaut était de ne proposer, pour ces répétitions, que des exercices, presque toujours grammaticaux, presque toujours identiques. Or, l’objectif de la répétition n’est pas de répéter à l’identique. La répétition des efforts de récupération doit répondre à des impératifs de qualité et de variation. Aussi, ces impératifs justifient l’emploi du mot « tâche » au lieu d’ « exercice ».
Nous l’avons vu, la pratique isolée d’un savoir-faire communicatif ne suffit pas à l’ancrer dans la mémoire d’un apprenant. Il doit répéter plusieurs fois cette tâche. Mais pour que cette multiplication soit efficace, il faut présenter la même information d’une manière différente à chaque fois. Cela permet de motiver l’apprenant d’une part (puisqu’il ne répète pas la même tâche à l’identique) mais aussi de le mettre dans une situation d’inconfort nécessaire à une progression dans l’apprentissage. Prenons quelques exemples.
En présentiel, en classe inversée ou en apprentissage hybride, les apprenants d’une classe ont été sensibilisés à un point linguistique particulier. Par la suite, l’enseignant assignera des modules qui auront le même objectif, mais selon des modalités et des approches différentes.
Par exemple, après avoir vu la structure des énoncés avec un verbe pronominal, il est possible de travailler la sémantique de ces verbes :
Ou de travailler sur l’identification des pronoms qui correspondent aux flexions verbales :
Toujours pour varier les approches, il est proposé aux apprenants de travailler sur des petites devinettes pour renforcer les pronoms compléments :
Afin de répondre aux besoins des apprenants en temps d’apprentissage et en efforts répétés de récupération, les compétences linguistiques sont travaillées par paliers : plusieurs modules ciblent une même compétence, dans plusieurs leçons du programme et en difficulté croissante.
Par exemple, pour que les apprenants acquièrent les valeurs de l’imparfait de l’indicatif, plusieurs modules sont à leur disposition :
En travaillant par paliers espacés (les apprenants découvrent l’imparfait en tout début de A2, et continuent à le travailler jusqu’à la fin du A2), les apprenants évitent une charge cognitive trop importante. Dans le premier module, il leur est uniquement demandé de choisir entre trois formes de structures impersonnelles à l’imparfait :
Bien que ce soit une tâche active (l’apprenant a à faire des choix), l’objectif est ici l’observation de ces structures, il n’y a pas encore de restitution. Ce travail d’observation est répété dans un autre module, plus tard dans le parcours d’apprentissage, et il est élargi à d’autres verbes :
C’est ensuite, pour renforcer le travail d’observation, qu’un effort de récupération est demandé aux apprenants :
Les efforts de récupération demandés aux apprenants varient, pour travailler d’autres compétences et éviter des phénomènes de lassitude. Par exemple, pour renforcer un savoir-faire communicatif (raconter des faits au passé) qui nécessite la maîtrise de l’imparfait, l’effort de récupération est demandé ici en expression écrite :
Encore plus tard, toujours dans la logique du renforcement de l’imparfait, un autre module abordera l’opposition entre la valeur de l’imparfait et celle du présent :
Certes, une dimension nouvelle est ici explorée, mais sur la base de connaissances que l’apprenant a déjà travaillées, et ces connaissances s’en trouvent ainsi renforcées.
La même logique se poursuivra ensuite pour les différentes autres valeurs de l’imparfait. L’apprentissage respecte les limites de la charge cognitive, tout en permettant un renforcement qui se base sur des efforts de récupération espacés dans le temps, et variés dans leurs contenus.
Dans sa progression dans la maîtrise d’un savoir-faire communicatif, il est très rare qu’une seule compétence linguistique entre en jeu. Par exemple, pour raconter des faits au passé, il est nécessaire de maîtriser l’imparfait (je jouais), mais aussi la conjugaison des verbes pronominaux ou la négation (simple ou complexe), autant de compétences parfois convoquées pour la construction d’un seul énoncé :
Je ne m’ennuyais jamais.
Il n’est bien entendu pas question de présenter toutes les modalités possibles d’un fait linguistique. C’est pourquoi certains modules de Frello visent à faire travailler des compétences croisées. Par exemple, certains modules concernent le passé composé, d’autres les verbes pronominaux ; pour le renforcement de ces deux compétences, il est proposé aux apprenants un module où est travaillé le « passé composé des verbes pronominaux » :
En parallèle des bénéfices du travail sur les compétences croisées, l’apprenant répète l’effort de récupération, et renforce ainsi des compétences en cours d’acquisition.
Outre les exemples de grammaire que nous avons vus, Frello permet un renforcement des compétences orales des apprenants, en particulier la compréhension orale et la phonétique.
En ce qui concerne la compréhension orale, la capacité d’un apprenant à mieux entendre et comprendre ce qui a été dit passe d’abord par un entraînement de sa perception. Quand il ne comprend pas ce qui a été dit, il faut en effet distinguer entre mauvaise compréhension ou mauvaise perception. Dans le premier cas, l’apprenant est susceptible de reproduire le même énoncé, mais il ne l’a pas compris en raison d’un mot qui lui est inconnu, ou d’une expression idiomatique qu’il ne connaît pas. Dans ce cas, c’est davantage le lexique qui est à travailler. Dans le second cas, l’apprenant n’a pas compris ce qui a été dit parce qu’il n’a tout simplement pas perçu ce qui a été dit. En effet, quand nous entendons une langue étrangère, il se peut que nous n’entendions pas tout car nous sommes exposés à ces sons pour la première fois de notre vie. Dans ce cas, c’est un entraînement qui permettra à notre oreille de, petit à petit, percevoir et identifier ces sons (même si certaines limites sont infranchissables pour les non-natifs et après un certain âge).
Pour effectuer ce travail de renforcement, vous trouverez sur Frello de nombreuses vidéos et de nombreux audios didactisés de compréhension orale. Les questionnaires qui les accompagnent permettent aux apprenants de vérifier immédiatement leur compréhension du document, et les réponses sont corrigées instantanément :
Indépendamment des objectifs pragmatiques ou linguistiques des cours en présentiel, l’enseignant peut assigner à ses apprenants ces tâches de renforcement de compréhension orale. Ces tâches peuvent aussi être réalisées par l’apprenant seul, en autonomie.
Il en va de même pour la phonétique, où des tâches répétées d’écoute/discrimination/répétition renforcent à la fois les compétences de perception et celles de prononciation de l’apprenant. Ces activités sont, elles aussi, présentées en paliers et par compétences croisées, comme le montre cette partie du référentiel de Frello (à gauche, l’intitulé de l’objectif, à droite, son emplacement dans le programme de Frello) :
La maîtrise d’une langue nécessite assiduité et répétitions. Ces renforcements permettent la maîtrise graduelle d’un savoir-faire communicatif. Pour que ce renforcement soit efficace, les modules de Frello ont respecté les principes suivants :
Gagnez du temps, enseignez plus facilement.